Faut pas prendre mes désirs pour des besoins!

Parce qu’un enfant gâté fini invariablement par se conduire comme… un enfant gâté!

À l’approche des fêtes, on songe bien sûr à choyer nos enfants, à leur faire plaisir. Rien de plus normal, mais attention à la multiplication des cadeaux!

Les tablettes des magasins débordent de jouets merveilleux et colorés, qui nous ramènent à nos propres désirs d’enfants. Si vous êtes comme moi, vous avez sans doute envie de tout acheter! « Wow! Un train électrique, j’en rêvais enfant! Une poupée qui parle! J’étais verte de jalousie devant celle de ma voisine… » Et on achète! Et encore un tout petit cadeau, et des souliers qui allument dans le noir, de toute façon elle a besoin de chaussures… et une petite robe… et…

Le soir de Noël, les enfants sont ensevelis sous une tonne de cadeaux qu’ils déballent à la chaîne à grands coups de « Wow! » et de « Ha! » Après un rapide merci, ils passent au cadeau suivant. Avec les cadeaux des grands-parents, des oncles et tantes, des amis et autres Pères-Noël improvisés, il n’est pas rare qu’un enfant reçoive plus de vingt cadeaux pendant la période des fêtes dont la valeur dépasse régulièrement 300 $ à 400 $! Combien de ces babioles a-t-il vraiment désiré? Faites le test : un mois après la fête, demandez-lui de vous faire la liste des cadeaux reçus; il est probable qu’il ne se rappellera pas la moitié d’entre eux… On parle de Noël, mais c’est la même chose à son anniversaire, puis à Pâques…

Dès le berceau, ils reçoivent des tonnes de jouets lumineux et sonores et ils sont habillés avec des vêtements coûteux. Ils font ensuite des voyages un peu partout avec la garderie, l’école, le service de garde et, la fin de semaine, avec leurs parents, sans compter les activités parascolaires, le camp de jour, l’été, et les vacances en famille souvent à l’étranger. Beaucoup d’enfants ont voyagé bien davantage que moi.

Quels sont les impacts de cette surabondance?

J’ai vu un jeune homme de neuf ans parcourir le catalogue de Noël d’une grande chaîne du début à la fin sans trouver quelque chose qu’il désirait et qu’il n’avait pas… Son entourage en était réduit à lui donner de l’argent ou des cartes-cadeaux qu’il ne dépensait pas non plus… J’ai souvent entendu l’entourage reprocher à cet enfant d’agir comme un enfant gâté… mais à qui la faute?

Par ailleurs, puisqu’ils auront tout vu, tout essayé, tout acheté, certains de ces enfants risquent de devenir des adultes blasés, malheureux et bien peu outillés pour faire face aux difficultés de la vie…  Les efforts? Bof! Travailler? Ouf! À force de leur enseigner la réussite sans effort, de les habituer à voir leurs désirs satisfaits rapidement, ne risque-t-on pas de mal les préparer à leur vie adulte?

J’entends d’ici certains adultes me répliquer : « Oui, mais J’AIME ça les gâter! Ça ME fait tellement plaisir… » Mais on priorise alors le besoin de qui? Celui de l’adulte qui cherche à se faire aimer de l’enfant et à générer des « wow » ou le besoin de l’enfant d’être éduqué et de recevoir des valeurs qui lui serviront toute sa vie?

De plus, lorsqu’on gâte un enfant, il fini invariablement par se conduire comme un enfant gâté! Et c’est alors à lui qu’on reprochera de ne pas être suffisamment reconnaissant alors qu’en bout de ligne, ce seront les adultes qui auront créé chez-lui des attentes démesurées. On m’a raconté récemment qu’une fillette de six ans, à qui son père reprochais de ne pas manger la glace qu’il venait de lui acheter a répliqué : « Oui, mais c’est toi le papa! Tu peux me dire non parfois! »

Que doit-on faire?

enfant gâté
  1. On devrait généralement répondre aux besoins de l’enfant dans un délai plutôt rapide et lui apprendre aussi à patienter dans certaines situations. Toutefois, si on ne veut pas d’enfants gâtés, on ne devrait dire oui qu’à seulement 10 % à 20% de ses désirs et généralement « non » aux caprices. (« Je veux le verre bleu! Pas le jaune! » ) Alors, avant de dire oui à une demande, réfléchissez bien… est-ce un besoin ou un désir?
  2. L’ensemble des cadeaux qu’il reçoit à Noël ou à sa fête ne devrait pas dépasser une somme de 150 $ à 200 $ (donc 3 à 4 cadeaux) . Cela inclut les cadeaux donnés par grand-maman et tante Julie! Au-delà, l’enfant ne les apprécie même plus et on lui en fera le reproche. Mettez donc des balises claires à votre entourage. Demandez-leur d’offrir des cadeaux collectifs et évitez de donner de l’argent aux enfants en bas âge sauf si vous allez avec eux choisir UN jouet au magasin dans les semaines qui suivent. Et puis, n’oubliez pas qu’on a le droit d’offrir un cadeau utile à un enfant, par exemple un nouveau sac d’école ou encore mieux, une activité à faire en famille : une journée de ski, une journée de bricolage, etc. Noël est la fête de l’amour non?
  3. Résistez aussi à la tentation d’acheter des « surprises » à tout propos. Si on prend l’habitude d’acheter quelques friandises, même si elles ne coûtent que quelques sous, chaque fois qu’on va au magasin, on développe de bien mauvaises habitudes de consommation chez l’enfant et il se mettra à considérer ce qui devrait être un privilège comme un droit! Il risque même, en vieillissant, d’avoir bien du mal à sortir d’un magasin sans voir acheté quelque chose.
  4. Avant d’acheter quelque chose, attendez au moins qu’il en ait exprimé l’envie. Laissez-le ensuite espérer, attendre avec impatience, ramasser une partie de l’argent nécessaire à l’achat de l’article… Il sera tellement plus heureux de son acquisition!
  5. Ne promettez jamais à l’enfant une récompense en échange d’un comportement simplement adéquat. « Si tu te comportes bien à l’épicerie, maman va t’acheter une tablette de chocolat. » Cela revient à le payer pour son bon comportement alors que ça devrait aller de soi. Seules les actions «extraordinaires » ou les situations qui représentent un défi pour l’enfant devraient être récompensées et, encore, pas à chaque fois. Les récompenses devraient diminuer à mesure que l’enfant grandit et devient plus habile. On devrait d’ailleurs davantage souligner l’effort que le résultat.
  6. Entendez et accueillez ses désirs avec chaleur sans pour autant vous sentir l’obligation de justifier votre refus: « Tu aimerais avoir cette robe? Oui, en effet, elle est magnifique ». Afin que l’enfant sache que vous tenez compte de ses désirs, vous pourriez aussi faire, dans votre téléphone intelligent, une liste de ses désirs: « Je vais la prendre en photo, comme ça, si je cherche un cadeau à t’offrir, je saurai quoi acheter. »
  7. Cessez d’avoir peur de frustrer votre enfant. La tolérance à la frustration s’apprend de la même façon qu’il a appris à marcher : avec de l’entraînement! À deux ou trois ans, un « non » déclenchera probablement une crise de colère, mais si vous accueillez son désir avec empathie (« Oui, je comprends que tu aurais aimé avoir ce camion, il est beau hein? »), ne cédez pas et ne portez ensuite pas trop d’attention à ses jérémiades, il  comprendra qu’il ne peut tout avoir. À trop chercher à éviter les pleurs et les frustrations, on renvoie l’image que ce n’est pas normal d’être frustré. Doucement, par étapes, il développera sa capacité contrôler et exprimer adéquatement ses émotions et il se sentira moins démuni lorsqu’il sera confronté à des refus et à des difficultés.
  8. Émettez des « non »  clairs, fermes et sans ambigüité. On peut se montrer emphatique et expliquer le refus, mais évitez de vous justifier longuement et, surtout, ne mentez pas pour camoufler votre « Tu veux une petite voiture? Non, papa n’a plus de sous… » Vous renvoyez alors à l’enfant l’impression que vous devriez dire oui chaque fois que c’est possible. De toute façon, il risque un jour de découvrir votre mensonge. Votre autorité en prendra alors pour son rhume!
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Le rôle du parent est, bien sûr, d’aimer, de soigner, de protéger son enfant, mais aussi de l’éduquer! Faites votre boulot de parent et, chaque fois que vous êtes tenté de gâter vos rejetons, pensez aux valeurs que vous désirez leur inculquer afin d’en faire des adultes heureux et épanouis…

Joyeuses fêtes