Plusieurs comportements indésirables des enfants ne sont simplement que la résultante d’une mauvaise habitude (plusieurs défauts des adultes aussi d’ailleurs)! Pas tous, évidemment! Certains comportements peuvent être le symptôme d’une problématique plus complexe ou simplement l’expression d’un besoin. Toutefois, même si on déteste tous se le faire rappeler, l’humain répète chaque jour une quantité incroyable de gestes et de stratégies de façon tout à fait inconsciente et automatique. Certains de ces comportements sont malheureusement néfaste pour l’enfant et son entourage et devront être réorientés.
COMMENT FONCTIONNE NOTRE CERVEAU?
Voici une petite leçon (très vulgarisée) sur le fonctionnement du cerveau humain: à l’intérieur de celui-ci, nous avons des neurones. Puis, chaque fois que nous posons un geste, une liaison se crée entre deux neurones (synapse). Ainsi, chaque fois que nous reproduisons un même geste, une synapse se colle sur la précédente de telle sorte que l’information passe de plus en plus rapidement d’un neurone à l’autre. Voilà comment se créent les automatismes.
Prenons l’exemple de l’apprentissage du vélo. Vous avez peut-être oublié votre propre expérience, mais quand un enfant apprend à conduire une bicyclette à deux roues, il doit penser à chacun de ses gestes au début afin de ne pas perdre l’équilibre. Progressivement, à force de répétition, la coordination des mouvements devient de plus en plus facile et, un jour, il enfourchera son vélo et pourra partir à l’aventure en riant avec ses amis, sans penser à ce qu’il fait. Une fois cet apprentissage bien acquis, plus jamais il ne « désapprendra » le vélo et, dix ou vingt ans plus tard, s’il reprend une bicyclette, il saura rapidement comment s’y prendre.
C’est un peu la même chose lorsqu’on apprend à conduire une automobile à transmission manuelle. Au début, chacune des opérations est pensée et exécutée de façon consciente. La moindre distraction et voilà que le moteur cale. Puis, à force de répétition, si l’on s’exerce un peu tous les jours, on devient plus habile. Environ un mois plus tard, on peut conduire tout en écoutant la radio et en discutant avec les enfants assis derrière.
CHANGER UNE MAUVAISE HABITUDE
Selon certains chercheurs, il suffit de refaire entre 21 et 30 fois les mêmes gestes afin qu’ils s’enracinent et se transforment en automatisme. Plus une habitude est ancrée depuis longtemps, plus il est difficile de s’en défaire. En fait, puisque les liens synaptiques ne se brisent pas, on ne peut faire disparaître une mauvaise habitude sans en créer une autre pour la remplacer. Toutefois, transformer une habitude et la remplacer par une autre peut être long, car plus le circuit neuronal est ancré depuis longtemps, plus le cerveau aura tendance à emprunter ce « bon vieux chemin » plutôt que le nouveau. Le changement demandera donc un bon entraînement et davantage d’efforts conscients. Il peut donc s’étendre sur une période de trois à six mois…
Comment peut-on appliquer cette méthode afin de modifier les comportements des enfants? Sachez qu’à la naissance, leur petit réseau neurologique est vierge. C’est donc nous qui le créons à partir des expériences que nous leur faisons vivre. La capacité de s’endormir est la première habitude que nous créons chez eux : bercez-vous votre chérubin chaque fois jusqu’à ce qu’il s’endorme? Eh bien! Après un mois, il y a de fortes chances qu’il n’arrive plus à s’endormir sans être balancé et que lorsqu’il se réveille durant la nuit, il pleure non pas parce qu’il DÉSIRE être bercé, mais parce qu’il en a BESOIN pour se rendormir. Il s’endort en tétant? Il aura besoin de téter pour se rendormir. On pourrait donc entraîner bébé à s’endormir seul dans son lit de façon à ce qu’il puisse se rendormir par lui-même s’il se réveille la nuit. On peut bien sûr le bercer et le cajoler quelques minutes avant, mais on le déposera dans son lit avant qu’il ne s’endorme. Bébé s’endort tous les soirs en pleurant? Il pourrait développer l’habitude de pleurer pour s’endormir.
Puisque les enfants intellectualisent peu les choses, ils agissent bien souvent de façon impulsive et fonctionnent par association émotive. Généralement, ils agissent d’abord un peu par hasard, puis, constatent l’effet que produit leur comportement. Ils cherchent, à tâtons, à répondre a un besoin ou un désir. Si la sensation qui découle de leur action est agréable, ils recommenceront, consciemment cette fois, dans le but d’obtenir la même réponse satisfaisante. Après l’avoir répétée une trentaine de fois, leur action deviendra une habitude et les gestes deviendront automatiques. Ils n’auront donc plus besoin d’obtenir une réponse agréable ou un gain quelconque…
Prenons l’exemple de l’enfant qui est jaloux du nouveau bébé de la famille et qui, pour avoir de l’attention, a développé l’habitude de faire des bêtises. Quel est son besoin, sont intention positive? Obtenir de l’attention. On doit donc lui enseigner des moyens positifs d’obtenir de l’attention et on l’aider à s’entraîner à utiliser ces nouveaux moyens plutôt que les anciens. Cette façon de faire lui évitera bien des conséquences et punitions tout en respectant son besoin.
Nous faisons, chaque jour, de façon programmée et souvent tout à fait inconsciente, une quantité infinie de gestes et avons plusieurs réactions et pensées: verrouiller les portes de la voiture, ouvrir la lumière en entrant dans la salle de bain et la fermer en sortant, tirer la chasse d’eau, faire son lit, etc. Changez les couverts de place seulement pour voir combien de fois vous ouvrirez la mauvaise armoire!
On peut toutefois utiliser la programmation neurologique afin d’aider nos enfants à développer des automatismes plus agréables, dont plusieurs comportements liés au développement de l’autonomie.
Il s’agit simplement de se rappeler qu’à force de le répéter, un comportement PEUT devenir une habitude.
Par exemple, à l’heure du bain, vous pourriez faire une liste de chacune des étapes (faire couler l’eau, aller chercher le pyjama, sortir une serviette, etc.) et accompagner l’enfant pendant 21 jours afin de l’aider à les réaliser, et ce, toujours dans le même ordre, en relâchant graduellement le soutien jusqu’à ce qu’il soit entièrement autonome dans sa routine. Vous devrez évidemment intervenir de façon chaleureuse et détendue afin que l’association émotive soit positive. Si l’adulte fait des reproches et des soupirs exaspérés, l’enfant risque d’avoir bien du mal à intégrer la routine puisque confronté à une situation désagréable, son cerveau est programmé à fuir ou se défendre.
QUE FAIRE?
- Tentez d’abord de déterminer si le comportement indésirable de l’enfant est circonstanciel, s’il est exécuté de façon volontaire et consciente ou s’il semble devenu une habitude plus profonde, un automatisme.
- Observez-vous vous-même : réagissez-vous toujours de la même manière à ses comportements? Alimentez-vous sa réaction?
- Changez d’abord votre façon de faire et tentez de briser la chaîne réactionnelle. Par exemple, si l’enfant fait invariablement une crise au moment de s’habiller le matin, on peut changer l’endroit ou le moment où il s’habille, s’habiller en chantant une comptine, etc. Vous devrez, bien sûr, créer une association émotive positive en lui donnant beaucoup d’attention et de chaleur pendant qu’il s’habille et très peu lorsqu’il refuse de le faire ou s’oppose. Personnellement, j’ai moi-même habillé ma fille les matins de semaine jusqu’en deuxième année et ce qui était au départ une source de tension est devenu un moment doux et agréable permettant ainsi de commencer la journée sur une note positive. Je l’ai aidé à développer son autonomie les week-ends puisque nous étions moins pressées.
- Cherchez la fonction du comportement. À quel besoin l’enfant cherche-t-il à répondre par ces gestes? Que veut-il obtenir ou éviter? Quels sont ses gains? Quelle est l’intention positive derrière ses actions?
- Remplacez le comportement inapproprié par un comportement plus positif mais qui préserve ses gains et répond à son besoin. Enseignez-lui, par des exemples et des mises en situation, ce que vous attentez de lui et assurez-vous qu’il ressent du plaisir à adopter ce nouveau comportement.
- Plutôt que de multiplier les reproches et les punitions, devenez entraîneur! Adoptez une attitude motivante et accompagnez votre enfant dans l’exécution des différentes étapes de son nouveau circuit neuronal! Par exemple, si Justin a pris l’habitude d’arracher les jouets de sa petite sœur et que vous désirez l’entraîner à les demander avec des mots, surveillez-le et, lorsque vous le voyez se diriger vers sa sœur, interceptez-le et accompagnez-le afin de l’aider à formuler sa demande verbalement. Si vous réussissez à lui faire exécuter une trentaine de fois cette opération, il commencera probablement à en adopter l’habitude et vous n’aurez plus qu’à diminuer progressivement votre soutien et valoriser ses efforts.
- Utilisez la programmation neurologique afin de créer des automatismes profitables pour l’enfant. Assurez-vous d’abord de créer des associations émotives agréables en ce qui concerne les différentes tâches. (Les devoirs, par exemple, ne doivent pas être perçus comme une tâche dont on doit se débarrasser, mais plutôt comme un moment d’apprentissage intéressant. Assurez-vous donc de garder une attitude ouverte, exempte de reproches et d’exaspération…). Établissez ensuite une séquence d’actions, puis accompagnez l’enfant dans les différentes étapes pendant environ un mois, pour relâcher progressivement votre soutien, mais tout en continuant de motiver et valoriser votre jeune.
- Il peut être intéressant d’utiliser un système de motivation, afin de motiver l’enfant à amorcer un changement et dans le but de créer une association émotive positive. Par exemple, vous pourriez lui remettre une médaille ou un jeton chaque fois qu’il a exécuté convenablement sa routine, lesquels peuvent être collectionnés, puis, échangés contre un privilège ou une activité récompense.
Finalement, rappelez-vous que si votre enfant a développé une mauvaise habitude, vous ne pouvez pas lui demander de cesser son comportement sans le remplacer par un autre, plus adéquat.
Soyez patients! Il peut avoir besoin de trois à six mois d’entraînement pour le faire.
Laisser une réponse
Voir les commentaires